Histoire Aramis n’est pas né si loin que ça de l’île d’Alera, puisqu’il est né à Hoenn, dans la petite ville si belle et pourtant si oubliée qu’est Autéquia. Peu de gens supportent le climat de ce village volcanique, où la cendre tombe sans cesse, et pourtant, on s’y fait vite, à condition de ne pas être asthmatique. La couleur grise du sol, le calme d’une faible population, où tout le monde connaît tout le monde, et la fierté de vivre près de réserves où vivent des Pokémons rares et unique dans la région… même si en tant qu’ado qui se respecte, le jeune garçon a souvent rêvé de partir loin de chez lui, il porte toujours Autéquia dans sa cœur, et elle lui manquerait parfois.
Il a vécu dans une fratrie de trois, avec un grand frère et une petite sœur. Aramis c’est le cadet, le gosse du milieu, celui qui se prend tout sur la tête quoi. Il n’en est pas mort, mais entre les moqueries de l’aîné et la mesquinerie de la benjamine qui adorait mettre ses bêtises sur son dos, il avait bien dégusté. Il n’avait pas vraiment l’air de saisir le concept de les ignorer pour arrêter de se faire enquiquiner, ce qui n’avait jamais arrangé les choses. Il n’était même pas encore arrivé au collège qu’il était amer et grognon h24. Pas vraiment apprécié des professeurs, et de toute façon, il ne les appréciait pas non plus. Il n’appréciait pas grand chose. Encore maintenant, il porte les rides indélébiles de son fronçage de sourcils de niveau olympique. Les seules choses qui ne lui faisaient pas tirer une moue abominable étaient les jeux vidéo sur lesquels il passait ses journées, et l’idée d’avoir un Pokémon un jour, ce qui, selon ses paroles de pré-ado edgy, était la seule chose qui lui permettait encore d’avancer. Seulement, personne dans la famille n’était dresseur, et adopter un de ces monstres était bien la dernière de leurs priorités. Pendant ce temps, assister à tous les concours tenus dans la salle à côté de sa maison depuis son enfance faisait rêver Aramis. Rêver d’être coordinateur. Un choix qui paraît un peu étrange pour un garçon affirmant ne rien aimer et que rien n’était beau dans la vie. ( Le pauvre était tellement incompris !) Mais il ne restait pas les bras croisés en priant pour que ce moment arrive. En attendant d’avoir l’autorisation de se parents, et accessoirement un Pokémon, il avait commencé à s’entraîner à coudre. Il composait lui-même des petits manteaux colorés qu’il vendait aux petites vieilles pour se faire de l’argent de poche. Celles-ci étaient ravies de pouvoir assortir leur Skitty à leur jupe tartan favorite. A force, il était même devenu capable de se confectionner ses propres tenues, et autres déguisements (pas déguisement, cosplay !). Cette activité lui redonnait lentement le sourire, mais alors vint le lycée.
Charge de travail plus élevée, qui l’empêchait de faire ce qu’il aimait, des camarades qui avaient des intérêts bien trop différents des siens, à qui il ne voulait même pas adresser la parole, des cours qui n’avaient rien à voir avec ce que sa vie rêvée lui demanderait… il avait fait de son mieux pour se forcer, vraiment, ses parents voulant absolument qu’il soit diplômé avant de se lancer dans une carrière de saltimbanque, comme ils décrivaient si bien le métier d’artiste Pokémon. Seulement, un trimestre à peine après sa rentrée, il ferma la porte de sa chambre à clé pour ne plus la rouvrir que pour le strict nécessaire. Dans son esprit, il était certain qu’on ne le laisserait jamais suivre ses ambitions, et que tout ce qu’il avait fait jusque là n’avait servi à rien. Et ça ne serait sûrement pas trois ans de prison et un pauvre bout de papier qui changeraient sa vie. Si c’était comme ça, il préférait largement ne faire que ce qui lui plaisait jusqu’à sa mort, puisse-t-elle arriver vite. Tous les jours se ressemblaient, à regarder la télé, jouer à des jeux, aller chaparder un paquet de chips et retourner jouer… Pendant un an, sa propre famille ne l’aperçut quasiment pas, à l’exception de rencontres sans paroles échangées autour du frigo vers deux heures du matin.
Les premiers jours, les parents d’Aramis avaient tenté de jouer de leur autorité. Ils avaient bien vite abandonné. Ils n’obtenaient même pas de réponse, peu importe la menace. Ils avaient alors décidé de l’ignorer, se disant que c’était la crise d’adolescence et qu’il sortirait avant le lendemain. Mais comme on le sait, il n’en était rien. Par désespoir, ce furent eux qui brisèrent la routine déprimante dans laquelle la maison était plongée. Ils craignaient de faire mal en cédant au caprice de leur fils, mais le voir se renfermer et ruiner son avenir de la sorte était encore pire. Ils durent se convaincre eux-même d’abord, mais après tout, si les voisins avaient fait confiance à leur fille quand elle avait voulu devenir dresseuse, il ne devait pas y avoir tant de danger que ça ?
Ainsi, un matin, en entendant frapper à sa porte, et après avoir attendu quelques minutes pour être certain de ne croiser aucun visage familier, Aramis alla ouvrir en pensant récupérer le petit déjeuner qu’on lui servait de la sorte depuis douze mois. A la place, il découvrit une sphère rouge et blanche, aka une Pokéball, pour les intimes. Une partie de lui avait envie de pleurer de joie tandis que l’autre restait méfiante et se brusquait totalement. Cela ressemblait beaucoup au genre de blagues de mauvais goût que son grand-frère avait eu l’habitude de lui faire. Certes, il n’en avait pas eu l’occasion depuis un an, mais dans son cas, le brun ne pouvait vraiment pas se permettre de baisser sa garde. Il resta encore plusieurs jours dans sa chambre à contempler presque sans relâche l’objet, ouvrant et refermant le clapet à l’infini comme si quelque chose allait se passer, réfléchissant à ce que ce message pouvait être. Une mauvaise blague, ou un cadeau ? Une fois sa méditation terminée, il osa faire ses premiers pas dans la lumière depuis ce qui semblait être une éternité. Sans grande surprise, on l’y attendait, et eut droit à une discussion qu’il écouta malgré le fait que son cerveau lui ordonnait de fuir sous son plaid préféré.
Aramis n’en croyait pas ses oreilles. Alors qu’il avait abandonné les négociations et même ses rêves, on lui offrait ceux-ci sur un plateau. Ses émotions étaient toujours conflictuelles. Malgré son enthousiasme, qui n’arrivait pas à se manifester, il ne pouvait pas du jour au lendemain cesser d’être méfiant. Certes, il allait profiter de cette occasion pour commencer à entraîner des Pokémon, mais il se préparait à ce que chaque instant de chaque jour, on lui reprenne tout. Il lui faudrait bien du temps pour y croire.
Son premier Pokémon, qu’il captura avec ladite Pokéball, fut un Nirondelle femelle, qu’il surnomma Nikki. Il se fichait bien de la rareté ou non du Pokémon, il était juste extatique d’en avoir un, et puis, elle était trop mignonne avec son petit bec et sa petite tache sous le cou ! Il était bien décidé à lui faire gagner tous les concours de la région, elle le méritait, sa petite princesse ! Les premiers concours ne donnèrent pas des résultats bien glorieux. Le charme d’une sobre attaque Picpic ne peut malheureusement pas séduire tous les cœurs. La deuxième recrus d’Aramis ne l’aida pas non plus à rafler les prix, puisqu’il s’agissait d’un Barpau à l’allure apathique et au teint gris. Le poisson lui valait des moqueries, mais il s’en fichait bien. Sans même penser à sa future évolution, il le trouvait réellement beau tel qu'il était. Le jeune homme passa deux ans sur les routes d’Hoenn avec sa petite équipe, il s’y amusait tellement qu’il avait totalement oublié la possibilité que son aventure prendrait un jour fin. Mine de rien, petit à petit, il avait lentement mais sûrement progressé. Et, même s’il n’avait gagné que trois rubans sur les différentes aires de concours, il avait fini par se sentir limité dans cette région qu’il connaissait par cœur. Il avait envie de voir plus loin, de visiter d’autres régions. La raison pour laquelle il avait pensé à Alera étais sa ressemblance avec Hoenn. Avec ses airs de grand garçon, il ne restait qu’un adolescent, et cette destination lui permettait de s’émanciper sans trop se déraciner.
Le jour de son départ, son grand frère lui avait prévu un cadeau. Le coordinateur fut d’abord ravi de recevoir un petit Marisson chromatique fraîchement sorti de l’œuf, avant de se rendre compte de la raison pour laquelle son aîné avait choisi ce Pokémon en particulier. Avec sa houppette brun-rouge, et, je cite « son air débile », il ressemblait beaucoup à son nouveau propriétaire. A cet instant, Aramis aurait volontiers tenté d’étrangler le dégénéré qui était censé partager son ADN avec sa queue de cheval de hipster, mais il se devait de garder une attitude positive. La dernière chose qu’il souhaitait était bien de retomber où il en était il y avait deux ans de ça. En plus d’avoir été la pire période de sa vie, il en avait extrêmement honte, et craignait que si c’était arrivé une fois, il n’y avait pas de raison que cela ne se reproduise pas. On lui avait répété que voir les choses du bon côté rendait heureux, et même si ça sonnait un petit peu niais, il avait décidé d’y croire. *soupire* Allez, Aramis, tu peux le faire, tout va bien… inspire, expire, montre ton plus grand sourire, en scène !
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