S'il y avait bien quelque chose que Varro recherchait depuis qu'il avait foutu le pied sur cette île à la noix, c'était...la quiétude.
Ben ouais. Une île pseudo-paradisiaque sans flics, sans teams, sans dresseurs aliénés et bordée de plages de sable fin et d'eaux splendides, c'était un peu l'idéal universel du terme "vacances", voire "retraite".
Sauf que pas de bol, dans sa recherche de paix et de silence, l'ancien criminel avait ramassé ce qui ressemblait fort au meilleur et au pire de ce bordel d'archipel. Entre Anaïs, adorable en toute circonstances, et Khârn, dont la seule existence était une insulte à la paix, sa quiétude, il pouvait s'en brosser l’œil.

Alors à défaut, le vétéran cherchait un bon café. Il avait connu la police, la Team Rocket, la solitude, l'errance, et les offices de tourismes. Des grains moulus, déshydratés, parfumés d'une manière ou d'une autre, il en avait connu plus que de raison. Mais lui, aujourd'hui, il en voulait un vrai. Un qui mériterait ce nom. Un breuvage propre, goûtu mais pas extravagant. Quelque chose qui lui permettrait de supporter son intenable horde sans l’écœurer.

Ainsi il avait entendu parler du "café des merveilles". Un nom de merde, s'il en est. Pendant des semaines, le vieil homme se refusa d'en approcher, méprisant ce qu'un patronyme aussi stupide pouvait représenter.
Cela dit, avec le temps, il entendait des rumeurs - et lisait de son oeil unique quelques flayers - que la petite boutique offrait un service de qualité. N'étant plus de service, quel qu'il soit, et après la consultation silencieuse de ses vieux amis, Varro se résolut à tenter l'affaire.

Seule Anaïs - récemment évoluée en Lucario, grâce à l'amour franc porté par la petite "famille" de Varro - accompagnait ouvertement l'ancien Rocket jusqu'au café. Toutefois à sa ceinture attendait paresseusement la capsule qui contenait le féroce Pharos, le Nidoking aussi rusé qu'impitoyable de Varro. Anaïs était douce, bienveillante, mais malgré son évolution, elle restait une jeune femelle à la force limitée là où Pharos pouvait être l'un des plus grands fléaux de l'île.
Une présence secrète que le vétéran avait accepté...et apprécié. Cela faisait plus de trente-cinq ans qu'il ne s'aventurait jamais nulle part sans avoir Arkhay, l'Arcanin, ou Pharos le foreur, avec lui. Il ne lui avaient jamais failli, dans la loi ou le crime, ses pokémons - ses frères - l'avaient toujours accompagné, jusqu'à refuser d'être libérés afin de rester avec lui jusqu'à ce la mort les sépare.

Mais fort heureusement, Pharos était discret...tant que tout allait bien, et ne ferait pas d'esclandre dans une banale routine. Si bien que l'ancien policier, qui dissimulait un couteau de guerre dans son dos, se présenta avec entrain au comptoir du "Café des merveilles".
Il grimaça un peu alors que son oeil unique peinait à lire la carte des cafés, l'âge se révélant un véritable handicap pour celui qui avait été vice-champion de tir autrefois, et consulta sa camarade bleue aux longues oreilles noires pour arrêter une commande.
Comme dans un bar, il s'accouda au comptoir avec nonchalance, imposant sa présence volumineuse avec autant de calme que d'autorité. L'ancien lieutenant de la plus grande mafia de Johto n'aimait pas attendre.

"Un macchiato steuplé. Même chose pour la p'tite. Et quelques biscuits avec, si tu as."

Il tapota la tête de sa Lucario, minuscule à côté de son énorme carrure, avant de se tirer un tabouret d'inviter la créature lupine à en faire autant, attendant patiemment sa commande.

S'il y avait une chose à reprocher à ce café, c'était sa fréquentation. Il était populaire, et pour un vieil homme cherchant la tranquillité, cette foule était un défaut. En revanche, s'il fallait lui reconnaître une qualité...c'était justement sa qualité. S'il était populaire, ce n'était sûrement pas pour rien.
La pauvre fille - c'était sûrement une fille, presque moitié moins vieille que la sienne, à vue de nez...peut-être - se démenait constamment pour satisfaire les commandes d'humains et pokémons qui fusaient à droite et gauche en continu.

La p'tiote devait "probablement" connaître son taf, car elle présenta leur commande en détail. Sauf que Varro était un ancien tueur, un spécialiste du meurtre, du racket, de la menace physique et psychologique, non pas de l'élevage ou de l'herboristerie. Aussi se contenta t-il de hocher la tête alors que la serveuse parlait de baies diverses et variées. Bordel, mais de quoi elle causait ?
N'y comprenant goutte, le vétéran tourna son oeil solitaire vers la Lucario qui approcha son museau, puis ses lèvres de la boisson et sembla apprécier, se mettant à sourire avant de goûter un biscuit avec le même entrain.
Devinant que le "produit local" plaisait réellement à la p'tite Anaïs, Varro se laissa tenter à sourire et leva une main pour caresser le crâne de la canidé bipède alors qu'il se risquait à goûter son propre breuvage.

Depuis qu'il était arrivé sur cette île à la noix, le vieil homme avait enchaîné les déconvenues. Pokémons farfelus, dangereux ou improbables, cafés infectes, rencontres inattendues en terme d'humain ou de monstres de poche, son séjour était assurément parti pour être la future définition e "vacances de merde" dans le dictionnaire.
Cela dit, ça commençait à s'arranger un peu...peut-être. Son Noarfang n'était pas un tordu et lui rappelait sa douce jeunesse, et ce café paraissait de qualité. Le breuvage était amer, fort, un peu sucré...et s'il aurait pu être meilleur, le vétéran n'avait pas à s'en plaindre, très loin de là. Trente ans plus tôt, il aurait littéralement tué pour avoir une telle boisson.
Bon, il y a trente ans, il aurait tué pour moins que ça...et s'il s'inquiétait encore du sort de son ami et patron Giovanni, Varro essayait de tourner la page, et se força à profiter du moment présent, d'un bon café dans un endroit "agréable" lorsqu'il remarqua que sa Lucario le dévisageait avec inquiétude.
Il n'arrivait pas à se faire à l'idée d'avoir une telle créature, capable de littéralement lire ses émotions. Arkhay savait les déchiffrait, mais il travaillait avec lui depuis plus de quarante ans. Pharos parvenait à les deviner, et parvenait à trouver la réponse à ses doutes avec le mutisme qu'il lui connaissait...mais il avait connu la mort, la gloire et la honte à leurs côtés.
Contrairement à Anaïs, qui était la cadette de son improbable équipe...Et qui pourtant, possédait une dérangeante acuité. La pauvre renarde aimait et admirait son dresseur, qui n'hésitait pas à se ruer en personne au combat, pour le meilleur et pour le pire...mais ignorait encore son histoire.
Et Varro ne tenait pas à ce qu'elle la découvre. Pour la rassurer, il lui caressa encore la tête avant de s'intéresser plutôt à la serveuse/patronne des lieux.

"T'as l'air de bien connaître les Pokémons, malgré ton jeune âge."

Alors même qu'il prononçait ces mots, le vétéran réalisa à quel point il se considérait lui-même comme un "vieux". Certes, il approchait de la soixantaine...mais ça ne faisait jamais vraiment plaisir de réaliser qu'on était l'un de ces types bizarres aux cheveux blancs, que l'on rencontre sur la route et qui disent des trucs étranges.

La tenancière expliqua qu'elle fréquentait les pokémons depuis ses six ans...et Varro n'eut aucune idée de ce que c'était censé expliquer. Qu'importe la région et l'époque, il suffisait, à tout âge, de faire quelques pas hors de chez soi - dans le pire des cas - afin de rencontrer un Pokémon. Lui-même avait grandi à Rosalia, une ville connue pour ses spectacles d'évoli.
Alors certes, il n'avait pas eu un pseudo-canidé sur son lit chaque matin depuis qu'il a ouvert les yeux...mais en avait-il besoin pour comprendre les pokémons ? Une telle réflexion l'amena simplement à penser que la gamine était juste une amoureuse de ces petites - ou boudiou d'immenses - créatures et aimait à les côtoyer.
Elle leur demanda ensuite s'ils avaient apprécié leurs commandes. Cette fois en revanche, l'expérience du vétéran lui fit comprendre que ça ne faisait pas longtemps que cette petiote bossait dans la restauration. Si le travail bien fait, quelqu'il soit, est toujours d'autant plus gratifiant lorsqu'il est apprécié, cette sensation de...nécessité d'être reconnu en disait long sur la serveuse.

"Pas mal."

Très loin de partager le laconisme de son dresseur, Anaïs lui flanqua un petit coup de coude pour manifester son contentement personnel avant de hocher son museau allongé en direction de la tenancière.

"Hmpf. Ca fait plaisir d'avoir enfin un truc qui ressemble à un vrai café."

Il grogna lorsque la Lucario lui flanqua un coup de pied dans le tibia. Mais la voyant regretter immédiatement son acte, il se contenta de lui tapoter la tête, une fois de plus, incapable de lui en vouloir tant elle était la plus gentille de son improbable équipe.

"Elle a apprécié aussi."

"Aussi" était un mot suffisant pour deux compliments, surtout au goût de Varro qui dressa un sourcil lorsque la serveuse, débordée par sa propre popularité, se retrouva parasitée par l'un de ses pokémons. Une bestiole qu'il plaignit immédiatement lorsqu'il entendit son épouvantable surnom "doudou".
Il ne put s'empêcher de ricaner, s'attirant une moue désapprobatrice de la part d'Anaïs, qu'il ignora bien rapidement, alors que la miss-café faisait la morale à sa peluche vraisemblablement pénible.

"Hin ! J'en ai aussi comme ça. Une idée de ma femme. Enfin, ex-femme. Sauf qu'en plus d'être pénible, il fait des éclairs."

Un demi-sourire étirant le coin de ses lèvres alors qu'il repensait à l'origine de l'intégration de Ruben à la "famille", Varro se réjouissait de son absence. La souris électrique aurait été trop heureuse de trouver un compatriote énergique et tactile avec lequel essayer de jouer, pour le meilleur et surtout le pire.
Cela dit, le vétéran aurait égorgé sans hésiter le premier qui oserait lever la main sur son "fils alternatif"...mais ça, il ne l'avouerait jamais.

Si quelque chose n'était pas prévu, c'est bien que la serveuse pète soudainement un câble. Qu'est-ce que c'est que ces jeunes qui ont désespérément besoin de s'inventer une croisade à la moindre occasion ? De son temps, les gens se battaient pour de vraies causes et réglaient ça comme des hommes - ou des femmes, le cas échéant- au lieu de brandir des hauts faits inutiles et pitoyables comme des étendards.
Le vétéran dressa un sourcil dubitatif alors que "doudou" retournait dans l'arrière-salle pendant que sa maîtresse s'intéressait à la vaisselle en retard. Pour sa part, Varro en avait trop vu pour s'énerver de si peu.

"En effet, c'est de ta faute si elle porte un nom humiliant."

Pas une seule seconde dans sa vie il ne lui serait venu à l'idée d'appeler l'un de ses pokémons "peluche" ou "mamour" ou même "caramel". Ce n'étaient pas des noms, et aucune créature au monde ne méritaient d'être affublé d'un tel patronyme ridicule.
Tout en sirotant son café, qui était fort appréciable, le vétéran commença à s'agacer des manières de la serveuse. Ce n'était pas de la mauvaise graine bien sûr, mais si personne ne la recadrait elle risquait de filer un mauvais coton.

"T'es bien trop jeune pour te vanter de ton expérience, gamine. J'ai vécu plus de quarante ans avec des pokémons capables individuellement de raser ton établissement en moins d'une minute."

Anaïs lui flanqua à nouveau un coup de pied dans le tibia en lui faisant les gros yeux, mais cette fois Varro le lui retourna en la foudroyant du regard de son œil solitaire. Aussitôt, la renarde baissa les yeux. Ne voulant pas qu'elle se sente trop mal de ses bonnes intentions, le vieil homme lui vola un biscuit afin de le lui tendre en signe de bonne volonté.
Après tout, ce n'était qu'une morveuse qui avait mal pris...mal pris quoi ? Varro n'en était même pas sûr, mais comprenait sans problème sa façon de se vexer pour ses proches. Si un fou s'était avisé d'insulter sa compagne ou ses monstrueux amis, l'ancien Rocket l'aurait littéralement épluché avec un couteau rouillé pour lui faire regretter durant ses dix prochaines générations d'avoir un jour eu le don de la parole.

Tout ça pour dire qu'il ne se souciait guère de l'incident et continua à siroter sa tasse, venant rapidement à bout de son contenu, avant de se risquer à goûter aux biscuits de la Lucario. Cela faisait depuis avant la naissance de la tenancière que lui et ses pokémons partageaient leur nourriture. Arkhay aimait à manger à la même assiette que son maître, et c'était un plaisir réciproque. Lorsqu'il n'y était pas contraint pour une question de budget, Varro se nourrissait généralement de ce qu'il servait à ses fauves...du moins, jusqu'il y a peu, car depuis quelques temps sa condition s'était quelque peu altérée.

Reconnaître ses torts est généralement un signe de maturité, puisque c'est le premier pas vers la sagesse. Cela dit, le vétéran avait plutôt l'impression que la serveuse se contentait de s'écraser et lui dire ce qu'il avait envie d'entendre afin qu'il lui foute la paix.
Navrante jeunesse...prête à tout afin de se mettre en avant, quitte à s'offusquer pour un nom pathétique qu'elle a elle-même donné à un ami proche, et pourtant pas foutue d'assumer jusqu'au bout ses convictions. Alàlà...de son temps, quand les gens avaient quelque chose à se dire, ils le faisaient les yeux dans les yeux jusqu'à ce que tout soit clair, quitte à ponctuer la discussion de quelques poings.
C'était l'bon temps...

La miss-café s'intéressa ensuite de près à Anaïs, et l'ancien Rocket ne fit même pas l'effort de relever l'insulte déguisée. Il était une brute, le savait, et le vivait très bien. Si la p'tite avait besoin d'une excuse pour le provoquer de façon détournée...hé bien qu'elle s'amuse !
Pour sa part, la Lucario commença à se dandiner sur la chaise, mal à l'aise. Maintenant qu'on s'adressait à elle, elle réalisait n'avoir jamais vraiment communiqué avec qui ce soit d'autre que Varro ou son équipe. D'une nature sociable, la renarde bleue avait envie de s'exprimer...mais si elle lisait aisément la bienveillance du jeune homme - et ne comprenait pas pourquoi son maître s'obstinait à le traiter comme une fille - elle décelait aussi la tension entre les deux humains.
Et s'il y a quelque chose qu'elle voulait à tout prix éviter, c'était une bagarre.

La voyant crispée sur sa chaise en lui jetant sans cesse des regards qui sonnaient comme des appels à l'aide, l'ancien Rocket jeta un coup d’œil dans le fond de sa tasse pour s'assurer qu'elle soit vide.

"L'autre tartignolle de Ruben avait encore foutu le camp, jusqu'à se planquer à la pension pokémon. Il a refusé d'bouger tant qu'on emmenait pas la p'tite bleutée."

Un souvenir qui renvoyait l'ancienne Riolu à une époque aussi pénible que proche. Elle baissa le museau d'un air morose en se rappelant comment elle avait été poussée à bout, puis laissée pour morte dans la rue, jusqu'à ce que le vieux couple ne la ramasse, peu avant l'arrivée d'un Raichu hystérique.
Varro ricana avec un demi-sourire en levant le coude une fois de plus, une vieille habitude qui visait à vérifier scrupuleusement si le verre était bel et bien définitivement vide, puis secoua la tête.

"C'est p'tet b'en la meilleure idée qu'il ait jamais eu, hein Ana' ?"

Il frotta à nouveau la tête de la Lucario, qui appréciait elle les marques d'affections, en se disant que c'était effectivement une bonne affaire. La renarde était très agréable à vivre, sa présence était un véritable vent de fraîcheur dans son quotidien et elle méritait une vie paisible.
Enfin, aussi paisible qu'il pouvait lui offrir avec sa petite troupe de cinglés... En repensant à l'enfer qui l'attendait chez lui, le borgne soupira. Est-ce que sa maison serait seulement encore là, où bien les deux mastodontes se seront une fois de plus mis sur la tronche pendant que sa dragonne rongeait jusqu'aux fondations du bâtiment ?

"Adorable petite Lucario, Adorable petite Lucario", d'habitude on attend au moins la quarantaine avant de devenir gâteux ! Varro préféra lever l'oeil au ciel en se plaignant silencieusement une fois de plus de la décadence de la jeunesse tandis que la serveuse se mettait à fouiller dans le comptoir, tout ça pour leur offrir un sachet de pofiteroles faits maison.
Un geste commercial des plus intéressants, même un vieux grincheux comme lui sait que ce sont d'excellentes friandises. Le vétéran en sortit aussitôt pour la proposer à Anaïs, qui avait bien besoin d'un remontant sans noter l'accord masculin volontaire de la serveuse.

"Y'a pas d'mal. J'préfère que tu te vexes pour la défense de tes potes, plutôt que tu laisses passer une insulte sans rien dire."

Même si à son sens, il n'y avait eu aucune insulte. Rire d'un nom ridicule tenait de la logique pour lui, mais au moins il pouvait aisément comprendre le raisonnement qu'il y avait eu derrière.

"Par contre, s'tu veux pas être irrespectueuse, évites de souligner l'ignorance de tes clients, ou de les prendre pour des cons. Ca, c'est l'meilleur moyen de t'attirer des ennuis, et si tu tombes sur l'mauvais gars, c'est eux il désigna la porte par laquelle "doudou" s'était débiné qui en feront les frais."

Il n'aimait pas qu'on se paye la tête, encore moins qu'on le prenne de haut, et certainement pas de la part d'une morveuse qui avait à peine le quart de son âge...mais il était devenu trop vieux pour exiger réparation pour si peu. Au contraire, en tant qu'aîné, il se sentait plutôt...le devoir de lui transmettre un peu de son expérience.
Car à n'en pas douter, la meilleure façon de faire souffrir quelqu'un, c'est de détruire ce à quoi il tient. Et ça, les gens qui vivent dans un climat "de paix" et de "bien-pensant" ont tendance à l'oublier.
Et pendant ce temps, la Lucario savourait sa friandise, son humeur s'améliorant alors qu'elle sentait les auras s'apaiser même si elle commençait à s'inquiéter de l'état de la vue de son dresseur, s'il n'était toujours pas fichu de voir que son interlocuteur était un homme.

Elle serait-y pas un peu déficiente, la serveuse ? Certes, les jeunes d'aujourd'hui vivent dans l'opulence et la paix, et ont une fâcheuse tendance à ne pas réfléchir à leurs actes et paroles mais...croyait-elle vraiment au fait qu'elle puisse souligner l'ignorance de quelqu'un - client ou non - comme si elle lui faisait une faveur comme si c'était parfaitement normal ? Même si elle était une sévère adepte de la prétérition ironique, ce serait un peu gros.
Y'a vraiment des baffes qui se perdent...

"S'tu voulais pas en parler, t'avais qu'à pas le faire. C't'aussi simple que ça."

De son temps, si quelqu'un - fusse-t-il un supérieur hiérarchique - avait osé s'adresser à lui ainsi, Varro l'aurait défié, aussi bien par les pokémons que par l'acier.
Toutefois, le vétéran avait su s'adoucir avec le temps. Il est des insultes proférées sciemment afin de blesser, et d'autres qui ne sont que des bourdes imputables à la jeunesse. Après tout, qui n'a jamais commis d'erreur, que ce soit hier ou aujourd'hui ? L'un des devoirs de l'âge, c'est d'apprendre la patience, voire même le pardon.

Bien qu'irritante, la pauvrette n'avait probablement pas souhaité que ça se passe comme ça. La dernière chose que pouvait vouloir un simple commerçant, c'était bien un esclandre, voire une altercation musclée. Et puis, Varro avait conscience de ne pas être l'homme le plus facile à supporter, surtout pour les p'tits jeunes qui n'ont jamais connu le goût de leur propre sang.

"Ca s'ra tout, merci. Ton café était très bon, mais j'dois pas en abuser. T'sais ce que c'est, avec l'âge...le coeur, les nerfs, tout ça..."

Crévingtdieu, v'là qu'il utilise son âge comme une excuse pour essayer de faire décompresser la barmaid. Et avec un compliment en prime, décidément, tout se perd ma p'tite dame ! Même le caractère de l'Ogre.
Retenant un sourire nostalgique, le vieux borgne se leva en se demandant ce qu'aurait pensé ce bon vieux Giovanni en le voyant ainsi tout en sortant son porte-monnaie, une vieille pièce de cuir usée plus que de raison.
Il tendit de quoi régler ses consommations à la tenancière - désespérant sa pauvre Lucario, qui se demandait définitivement si n'avoir qu'un seul oeil n'affectait pas gravement sa vision - en se faisant pensif.

"Dis-voir, t'as une limite de taille sur les bestioles qui peuvent rentrer ? Pask'j'aurais bien deux, trois potes qui s'raient sûrement ravis d'prendre un café et quelq'biscuits, mais y sont un peu...il leva la main jusqu'à la hauteur de ses propres épaules, et dressa un sourcil dubitatif en évaluant sa mesure ...gros."

Déjà, hors de question d'y envoyer Krokette et Ruben. Ils sèmeraient le chaos en un rien de temps, et le vieil homme serait bon pour rendre des comptes. Toutefois, il y enverrait bien la p'tite Anaïs, qui mis à part l'embrouille entre les deux humains, avait adoré son séjour dans l'établissement et surtout ses deux canidés.
Il ricana en imaginant déjà la scène des deux chiens, assis face à face autour d'une assiette. Alicia faisant sa timide tandis que le chien-lion tenterait les feintes les plus éculées du monde pour s'en rapprocher. Un vrai film d'animation à l'ancienne, ouaip !